Une fois les fermentations malolactiques finies, une belle surprise nous attendait : les vins sont délicats, élégants, élancés et juteux. Ce millésime nous plaît, il nous plaît beaucoup.
Cette fin de semaine nous avons entonné toutes nos cuvées parcellaires 2019, relogé pour l’élevage Trespotz et le Serpent à plumes. Quand nous avons terminé la journée, nous avons éteint toutes les lumières et respiré un grand coup. Le chai était enfin calme, après deux mois de marathon. Nous avons commencé les vendanges il y a deux mois. Tous les ans, nous mettons environ deux semaines à récolter toutes nos parcelles à la main. Je travaille avec l’équipe aux vignes et Nicolas s’occupe de réceptionner le raisin au chai. Réceptionner le raisin mais pas seulement, il faut aussi presser les blancs et le rosé pour Serpent à plumes, tout nettoyer, toujours, débourber, faire des remontages, bichonner nos levains indigènes, suivre les densité et bien tout noter dans la traçabilité (c’est moins sexy que de faire du vin, mais absolument nécessaire pour nous et pour les différents contrôles : bio, AOC, douanes, etc). A cette époque, le domaine est une vraie ruche, nous sommes vingt, ça discute et ça chante dans les vignes et ça nous fait un bien fou. On pense au moment où l’on va être seuls dans le brouillard froid, à tailler. L’agitation des vendanges nous manquera, même si la solitude a aussi ses charmes. Lorsque nous finissons de couper le raisin de la dernière parcelle nous sommes généralement soulagés : toute notre production est à l’abri et nous allons pouvoir nous occuper du futur vin à plein temps. Cette année, c’est du blanc que nous sommes allés chercher. Il pleuvait un peu, il faisait déjà froid en ce début octobre. Nous vendangeons tard à Cahors. Vient ensuite le travail du chai. C’est une partie mystérieuse de notre métier. Lorsque les gens pensent au vin, ils pensent à la récolte, mais le raisin ne devient pas vin une fois coupé, il reste encore toutes les vinifications, les remontages, les décuvages, les pressurages, et goûter, beaucoup, toujours, pour choisir les chemins à prendre. Tous les ans nous changeons, nous nous adaptons au nouveau millésime. Nous tâtonnons et nous doutons beaucoup. Nous discutons beaucoup, avec Nicolas, chaque choix est pesé, argumenté. Nous demandons souvent l’avis de Nathan, qui travaille avec nous et, cette année, d’Edouard, qui nous a rejoint pour quelques temps, avant de (peut-être) s’installer lui aussi. Parfois, les décisions sont évidentes et dans ce cas, nous ne perdons pas une minute. C’est un drôle de rythme, fait de lenteur et d’accélérations soudaines. Et de beaucoup, beaucoup d’heures passées au chai ! Le millésime 2019 nous a surpris. Avec la sécheresse de l’été, nous nous attendions à des jus acides, tanniques, concentrés. Nous avons redoublé de vigilance et travaillé les marcs avec énormément de délicatesse. Nous avons attendu longtemps, après la fin de la fermentation alcoolique, que les jus se posent, s’harmonisent, avant de décuver et de presser. Nous avons fermé les cuves et nous sommes armés de patience. La Butte Rouge nous a souri le 8 novembre. C’était le dernier décuvage de l’année, plus d’un mois après avoir cueilli les raisins, quitté les vignes et investi le chai. Une fois les fermentations malolactiques finies, une belle surprise nous attendait : les vins sont délicats, élégants, élancés et juteux. Ce millésime nous plaît, il nous plaît beaucoup. Nous avons profité du relatif calme d’après vinifications pour mettre en bouteilles et étiqueter toutes nos cuvées. Ainsi, les vins de 2019 cohabitent avec les cuvées toujours en élevage et les vins en bouteille. Trois millésimes se croisaient ainsi dans notre cave, qui en barrique, attendant son heure, qui en bouteille, prêt à partir et qui, tout jeune arrivé, pas encore relogé pour l’élevage. C’est assez émouvant, ce travail du temps, cet enchevêtrement dans la vie des vignerons. Nous avons encore en cave des vins de notre premier millésime, quelques barriques, bonde de côté, que nous avons souhaité élever trois ans, ou plus, selon ce qu’elles auront à dire. En parallèle nous avons été semer, cet automne, une belle parcelle nue. Nous y avons mis quelques engrais verts pour la préparer et un jour, dans quelques années, la planter. Pendant qu’Alix fait ses premiers pas dans la cuisine, je ne peux m’empêcher de rêver que c’est elle qui en récoltera les fruits à pleine maturité, dans 25 ans. Car il faut penser au futur, lointain mais également proche, au millésime qui s’annonce, à la saison de taille qui va bientôt commencer. Et ce mois de novembre automnal, gris, pluvieux et triste, je l’aime pour cela. Il est un moment de pause, un croisement des époques, à la fois hors du temps et déterminant. Un mois central dans nos vies de vignerons. - Maya -
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Notre domaine
Le domaine de la Calmette est situé à Trespoux-Rassiels, sur le plateau qui surplombe Cahors : entre ciel et terre, les pieds dans le calcaire du causse et la tête dans les nuages.
Sur ce blog,nous vous raconterons mois après mois notre chemin de jeunes vignerons et ses nombreux détours.
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