La vigne pousse bien à présent, après un début du mois de mai assez frileux, où l’on a frôlé le gel plusieurs fois et où les plantes sont entrées dans une torpeur bien compréhensible. Les bourgeons floraux sont bien visibles maintenant et les rameaux grandissent. Les dégâts dus à la grêle de mi-avril et aux mange-bourgeons ont été compensés par la vigne. Là où un bourgeon a sauté, un contre-bourgeon s’est développé la plupart du temps ; on voit très bien sur la vigne ces rameaux plus tendres, bien moins développés que leurs voisins, et qui portent des fleurs plus petites.
Les fortes pluies de la fin mai (35 et 80 mm) vont sans doute chambouler cette belle santé. Oui, c’est clairement beaucoup d’eau, largement suffisant pour bien lessiver les traitements et rendre les vignes vulnérables au mildiou et au black-rot, qui doivent se régaler en ce moment même. Mais ce n’est pas pour cela que j’ai appelé l’article « le grand bain ».
Les SAFER, pour société d’aménagement foncier et d’établissement rural, existent depuis 1960. Gérées par le syndicat agricole majoritaire (aujourd’hui, la FNSEA) et par les collectivités territoriales, elles ont pour mission de contrôler toutes les transactions de terres agricoles. Le but : favoriser l’installation des jeunes, permettre aux exploitations jugées trop petites de s’agrandir et empêcher la perte de surfaces agricoles et la spéculation. Ces objectifs d’utilité publique se traduisent dans les faits par l’exercice de la préemption, c'est-à-dire que sur un projet jugé problématique ou sur des terres convoitées par un autre agriculteur, la SAFER suspend la vente, achète le bien et arbitre entre les projets concurrents.
La SAFER est une institution efficace et son utilité est reconnue par toute la profession. Il arrive parfois que son action soit contestée (par exemple localement, voir cet article). Les critiques sont inévitables, puisque la SAFER, par ses choix et ses arbitrages, oriente la politique agricole du département selon la vision du syndicat qui la dirige.
Recherche de la compétitivité économique des exploitations pour la FNSEA (aux commandes partout ou presque), multiplication d’exploitations autonomes pour la Confédération, les objectifs ne sont pas les mêmes, parfois ils s’opposent, et ce débat a aussi lieu au sein des SAFER.
Parce que nous avons signé un compromis de vente pour plusieurs parcelles que nous reprendrons l’an prochain, après les vendanges.
Nous l’avons signé il y a un peu plus de deux mois, sans recevoir de lettre de la SAFER. Cela signifie que non, il n’y aura pas de préemption et que personne d'autre que nous ne désire acheter ces terres. À présent, la seule chose qui pourrait arriver, c’est une rétractation du vendeur. Même si c’est peu probable que cela arrive, nous croiserons les doigts. Pas de magnums de champagne cette fois-ci, pas pour le moment !
Les vignes sont en bonne santé, avec peu de manquants et des sols déjà travaillés. La conversion en agriculture biologique ne devrait pas poser de problème majeur. Les parcelles sont proches, mais établies sur des expositions et des sous-sols différents. Nous commençons déjà à projeter laquelle sera plus puissante avec son sol riche en argile rouge, laquelle fera des vins sur la finesse et la tension avec un sol riche en calcaire et une exposition nord... Pour tout vous dire, nous avons hâte de pouvoir goûter les caractéristiques de chacune d’entre elles.
Sept hectares, ce sera beaucoup de travail et beaucoup de temps dans les vignes. Cette année, avec 1 hectare, nous servira donc définitivement de galop d’essai ! À nous de nous équiper, de maîtriser les gestes le mieux possible, et d’être fin prêts en décembre pour sauter dans le grand bain.
Nicolas