Nous habitons depuis quelques temps dans un joli département agricole, où les gens parlent encore des vendanges foulées au pied chez les grand-parents, de la parcelle de chênes truffiers qu’ils ont plantée pendant leur temps libre ou de la grande fête familiale de février, quand on tuait le cochon. J'aime cette France rurale. Celle des savoirs anciens et des traditions paysannes qu’il faudrait réussir à rattraper avant qu’elles nous échappent. Samedi, pour moi, c’était donc jour de fête. Nous étions invités par un ami, micro-vigneron du dimanche, pour les vendanges. Tout le hameau était réuni comme tous les ans à la même date : la fille du pays qui a hérité de la maison familiale, le voisin anglais, le couple ch’ti installé depuis peu dans la région, les copains auvergnats qui venaient de loin, le grand-père de 95 ans, les enfants et les chiens de chasse. Toutes les générations sont regroupées autour d’une journée de labeur, certes, mais aussi et surtout de partage, d’entraide et de grandes tablées. Je suis heureuse de voir les enfants s’amuser à vider les paniers, venir couper du raisin (et en manger la moitié) et grimper sur le tracteur. Je me dis qu’ils repartiront avec le souvenir d’une journée joyeuse et ensoleillée passée dans les vignes plantées par le grand-père, quarante ans auparavant. Celui-là même qui ne voudrait rater l'événement pour rien au monde et qui est venu, béquilles en renfort, nous parler du temps où il avait encore quelques vaches, des noyers et de la vigne et qui nous donne, en anciens francs et avec une précision étonnante, les prix de vente des noix et les salaires de ses deux ouvriers de l’époque. A midi, à l’heure de la pause, nous nous attablons autour des plats concoctés par Yvonne, femme tempête à la générosité franche et directe. Sa cuisine l’est tout autant et nous nous régalons de terrine de foie gras aux truffes, de civet de chevreuil et de tarte à la tomme du Cantal. Ce qui m’impressionne dans tout cela, c’est que le repas est quasi-exclusivement produit sur place, "localvore" comme on le précise en riant. Nos amis chassent, élèvent des poules, ont leurs chênes truffiers et leurs vignes, font du miel avec leurs ruches, cultivent leur potager et transforment à tour de bras. Inutile de vous dire que c’est très bon, surtout le vin, qui m’épate par son fruité et sa netteté. La lumière de l’après-midi s’étire dans les vignes. Les genoux craquent et les dos raidissent. Je discute avec la voisine et le jeune couple récemment arrivé. Ils ont tous fait le même choix de vie en s’installant ici. Le choix d’une vie plus lente, plus authentique et plus laborieuse. Le choix d’une vie plus proche de la terre et de la nature pour leurs enfants, même si cela veut implique de longs aller-retours à Toulouse chaque semaine pour le mari de l’une, et de tout quitter pour les autres. Le jeune papa regarde autour de lui, sourit en voyant son fils sur la remorque et me dit : "voilà, c’est pour des journées comme celles-ci que je suis venu". Le soir, le vin de 2014 coule à flots, et l'on se dit qu'on sera là l'année prochaine pour goûter le 2015 tout juste mis à fermenter dans une vieille cuve en bois. -Maya -
1 Commentaire
Pacalou
25/9/2015 07:51:49
Superbe article Maya ! Ca y est, a cause de toi j ai envie de faire les vendanges ! Bisous
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Le domaine de la Calmette est situé à Trespoux-Rassiels, sur le plateau qui surplombe Cahors : entre ciel et terre, les pieds dans le calcaire du causse et la tête dans les nuages.
Sur ce blog,nous vous raconterons mois après mois notre chemin de jeunes vignerons et ses nombreux détours.
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