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VDV #78 : les peaux veloutées d'un Riesling bien né.

25/9/2015

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Lorsque j'ai appris que Sandrine, de la Pinardothek, et David, d'Abistodenas, avaient choisi "Peau(x)" pour thème du Vendredi du Vin de septembre, je me suis dit que c'était un thème idéal pour une première participation.

Le thème était large, poétique, plein de possibilités charnelles ou factuelles, et donnait l'injonction suivante :
Parlez-moi donc de ces peaux usées, burinées, des mains, des pieds, du hâle des vigneron(ne)s. De celles de ces baies épaisses ou diaphanes, qui contiendront -peut-être- l’essence du vin. De la peau en vinification?  Des ces vins que vous buvez à fleur-de-peau, de ceux qui vous tannent, de ceux qui vous donnent la peau velours. De ceux qui en sont presque une seconde. Parlez-moi de ces minutes-là, de ce que ça fait à votre peau, juste avant la chair.
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Parler de vin et de peau dans la même phrase, un mois de septembre, c'est un coup à me faire retomber dans mes fixettes. Deviner ce que la peau du raisin va pouvoir donner, la goûter, apprécier la finesse du grain ou bien ses rugosités. S'efforcer de la travailler en douceur sans l'irriter, à la caresser sans être grossier. Savoir s'arrêter, savoir insister. Voilà : c'est ce que fait un vinificateur à l'automne.

En rouge, c'est bien connu : le travail des peaux est long, cela prend plusieurs jours ou plusieurs semaines. Les peaux macèrent et flottent à la surface de la cuve. On peut utiliser des pompes pour arroser ce chapeau, ou une pige pour le faire couler. Une maturité insuffisante des peaux, ou bien un vinificateur trop brutal, c'est le drame : le vin se brusque, devient austère, amer. Quand tout va bien, quand de jolis raisins rencontrent un vigneron qui sait comment s'y prendre, c'est doux, soyeux ; c'est un beau vin rouge.

Ce qu'on connaît moins, c'est l'importance des peaux dans l'élaboration du vin blanc. Oh, c'est sûr, le jus et les peaux ne se voient pas longtemps, quelques heures tout au plus. Ils sont vite séparés par le pressurage. Mais ce qu'ils peuvent échanger pendant ce bref laps de temps est capital. Pas toujours, bien sûr. Là aussi, il faut du savoir faire. Cette rencontre des peaux et du jus peut pourtant marquer le vin pour toujours.

Tout cela est un peu abstrait, je le sens. Des belles histoires sur le vin, faites de charmante rencontre et de métaphore balourde, vous en avez déjà lu plus qu'il n'en faut. Alors entrons dans le vif du sujet, et partons pour l'Alsace où la question des équilibres et des textures est prise très au sérieux.
Les vins blancs alsaciens sont construits sur des équilibres complexes : sur le sucre et sur l'acidité, bien sûr, mais aussi sur une petite dose de tanins. Ces tanins, avec le gras du vin, forment la matière. C'est elle qui donne de la tenue aux vins doux ou demi-secs ; elle encore qui habille les vins secs et les rend plus aimables.
Cette matière vient essentiellement des peaux. Il faut savoir aller la chercher. D'abord à la vigne, par une agronomie de qualité, qui maîtrise la vigueur de la vigne et vous fait récolter des raisins mûrs et sains. Ensuite, pendant les heures cruciales entre la récolte et le début de la fermentation, ces 24 ou 36 heures qui définissent le goût du vin blanc pour toujours, essentiellement au cours du pressurage.
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oui oui, dans cette machine.
Alors c'est quoi, un pressurage réussi ? Certains vignerons disent que les baies ne doivent pas éclater, et que le jus doit couler à travers la peau, emmenant tanins fins et arômes. Ce n'est pas facile : il faut récolter à la main pour presser en grappes entières, être patient, bien connaître son matériel et ses raisins, et être prêt à laisser le pressoir tourner toute la nuit. Pour obtenir des résultats similaires, d'autres vignerons laissent macérer les raisins dans la cage du pressoir. D'autres encore laissent infuser des peaux dans le moût en fermentation. Bref : chacun a ses secrets pour obtenir ce qu'il veut de ses peaux.

Un vin blanc qui m'évoque immédiatement cette extraction précise et délicate des peaux, je ne l'ai pas cherché longtemps dans ma cave. J'ai ouvert un Riesling "réserve personnelle" de Jean-Paul Schmitt, millésime 2009.
Jean-Paul Schmitt exploite à Scherwiller, au pied du château de l'Ortenbourg, un domaine d'un seul tenant situé sur le terroir du Rittersberg, en agriculture biologique. Il prolonge ce travail par des vendanges manuelles et des pressurages longs. C'est un des vignerons d'Alsace dont j'aime le plus le travail, notamment pour ses Pinots gris secs et son Crémant extra-brut .

Ce Riesling de 2009 est à pleine maturité. D'une belle couleur or pâle, parfaitement limpide, il exhale un nez de fleurs sèches, camomille, tilleul. Le fruité est séveux, le citron se fait bergamote. Il y a une douce nuance végétale qui rappelle la sauge, et en fond, l'odeur des pierres chaudes.
La bouche est bâtie sur une trame acide, sans que le vin soit vif, car il y a pour équilibrer un gras et une matière impressionnante. J'aime ce grain tannique très fin, qui allonge la bouche et la raffermit, typique des peaux de Riesling bien mûres. Le vin est à la fois solaire et évanescent, joyeux et posé, complexe et sage, charnel et cérébral. On croit le saisir, mais c'est pour mieux être surpris la gorgée suivante. La dégustation est très longue, portée par son grain, par la salinité de sa finale et par son élégance altière.

Un vin qui demandera des égards lors du service : un accord trop cavalier ou trop osé, et vous le perdrez. Délicatesse et subtilité. Sur un poulet grillé épicé, ça ne marche pas, n'essayez pas. Le lendemain, nous le boirons à l'apéritif avec des pistaches iraniennes au citron, un accord simple mais réussi. Le vigneron aime l'associer avec des écrevisses, du sandre ou de la lotte au safran. Voilà effectivement des accords à la mesure de sa grâce.

Nicolas
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